mercredi 20 avril 2011

Cosmogonie technoscientifique


Si, parodiant Blaise Pascal, j'écris que l'homme est un réseau pensant, je change totalement de paradigme. Je passe d'une cosmogonie chrétienne, où le philosophe souligne tout à la fois la faiblesse de l'homme et ses vertus (flexibilité, résistance et puissance de l'esprit), à une cosmogonie technologique où l'homme se situe au carrefour des réseaux numériques dont il reçoit les informations qui le déterminent, mais aussi où il est acteur et synthétiseur d'idées. L'homme perd de son unicité psychologique et spirituelle, mais enrichit sa conscience d'innombrables informations qui l'"irriguent", comme une "sève numérique". "Je est un autre", disait le poète et cela devient plus manifestement vrai dans la cosmogonie actuelle, qui substitue le mythe de la surface (médiatique) à celui de la profondeur (de l'inconscient).
Passer d'une cosmogonie, et donc aussi d'une image de l'homme, chrétienne, monothéiste, donc religieuse, à une cosmogonie technoscientifique, c'est une révolution civilisationnelle majeure, encore que cette nouvelle cosmogonie soit de racine grecque, prométhéenne. Elle l'emporte donc aujourd'hui sur la cosmogonie biblique. Et l'homme lui-même change beaucoup aussi. De victime de Dieu (chassé du Paradis terrestre), fragile et résistant par sa soumission même, il devient le vainqueur de Dieu, et libre créateur de son propre univers grâce à la nouvelle puissance - humaine et non plus divine -, qu'il tire de la science et de la technologie. L'homme qui se voit comme un réseau pensant, comme un hypertexte vivant, traite et transforme les informations qu'il capte en idées créatrices de l'hypertexte humain global, planétairement interactif et responsable de sa propre destinée, dans lequel il se situe. Certes, Dieu était une invention débile, Mais la caricature de cette nouvelle cosmogonie humaine est tout aussi stupide: c'est évidemment le cyborg, le posthumain, dont quelques gourous prosélytes inconsistants nous vantent l'avènement navrant.

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